mardi 27 novembre 2007

samedi 24 novembre 2007

Poème

Juste avant…

Et lorsqu’à la fin
Il ne me restera plus rien,
Plus rien que le goût du combat
Durant lequel chaque seconde
Est une victoire qui s’en va
J’aurais alors encore la faconde
Des souvenirs de ma vie
Me susurrant sans cesse
Au creux de ma survie :
« Qu’elle était belle, cette prouesse. »

lundi 19 novembre 2007

Poéme

Une larme

Elle éclate
Délicate ;
La goutte
Coupe
L’équilibre
Chaotique
Que calibre
L’extatique
Équation
D’émotions
Démentielles
Substantielles
Contenues
Dans un coin
Ténu
De mon cœur.

Libérant
La douleur
La joie
La peur,
Parfois
L’éclat
Toujours
D’une larme
Au grand jour
Complète
Une vie plate.

dimanche 11 novembre 2007

Poème

Les danseuses

Le mouvement mou de la mer
Ondulant en vagues successives
Balance en une cadence régulière
Des paquets d’algues lascives.

Suivant ce déhanchement fluide
Cette chevelure de Sylphide
Va et vient inlassablement
Roulée qu’elle est par les bras lents
De ce danseur insatiable
Qu’est l’océan malléable.

mercredi 7 novembre 2007

Poème

La surprise

Elle fait tomber l’emprise
D’un quotidien que balise
Les habitudes si bien prises
Au creux de cette méprise :
« La vie dure… »

lundi 5 novembre 2007

Poème

Ma montre c’est arrêtée…

Elle a cessé d’engloutir les secondes
Qui donnaient à ma vie la faconde
D’une illusion féconde
Pour tenter d’habiter ce monde.
Ses petits claquements secs
Ondes électriques extatiques
Qu’elle piquait du bout de son bec
Sont à jamais devenues statiques.

Et pourtant,
Le temps
Et sa course folle
A continué son envol.

Ma montre c’est arrêtée
Mais ailleurs
Une autre,
A du prendre le relais.

samedi 3 novembre 2007

Nouvelle : La jonction des parallèles (3)

La jonction des parallèles (3)
Le ciel gris et encore lourd commençait à se déchirer par endroit et à laisser apparaître de petits morceaux de ciel bleu en cette fin de journée. De courtes rafales de vents soufflaient par moment, agitant parfois des morceaux de plastiques pris dans les arbres, perchés comme des guirlandes de désespoirs.
Il avait croisé des monceaux de mort et des morceaux de vies hébétées, des amas de tout et des fragments de rien, au milieu duquel des hommes erraient, abasourdis par la puissance du choc et l’injustice de celui-ci. Et avec tout cela, avec toutes ces vies broyées, ces vivants qui ne savaient plus pourquoi ils étaient là si ce n’est pour survivre dans un enfer, il disposait de trente quatre seconde pour faire comprendre à tous ceux qui étaient restés là bas, ce qui se passait ici.
Lorsqu’il poussa la porte de sa chambre vers vingt et une heure, il n’avait plus prononcé un mot depuis longtemps. Cette vision de fin du monde dans laquelle étaient englués ces êtres humains l’avait profondément atteint.
La nuit passa. Un peu assis sur le bord de son lit, un peu devant sa table de travail, un peu dans le sommeil, la nuit passa, plaine de fantômes. Vers trois heures du matin le téléphone sonna.
« - Fred ? C’est bon t’es prêt ?
« - Hum….
« - …ça va ? t’as pas l’air euh… ?
« - Non c’est bon. Je passe dans combien de temps ?
« - Je te rappelle dans une heure et tu passes à ce moment là.
« - Ok. A tout à l’heure. »
Une longue et lente heure d’attente commença donc. Privé de sommeil, trop hanté qu’était celui-ci par des visions de morts en sursis mais ne sachant plus quoi faire éveillé, Frédéric resta assis là, passif, en plein milieu de cette nuit malgache. Vint l’heure des trente quatre secondes, le moment où une petite fenêtre d’espoir et d’intérêt allait s’ouvrir en occident pour tous ces gens qui mourraient dans cette île.
« - Tu as l’antenne dans 5secondes, quatre, trois, deux, un, top »
Tout se déroula comme si une autre personne que lui parlait. Il avait l’impression que les mots sortaient sans qu’il ne les comprenne. Il récita son texte tentant à chaque instant de garder ce ton neutre et professionnel qui faisait de lui un journaliste. Mais il se sentait empli de tant de sentiments contradictoires qu’à plusieurs reprises il avait voulu se mettre à hurler dans l’appareil qu’ici les gens mourraient de n’être rien par rapport au reste du monde ; que non seulement ils avaient du subir les assauts dévastateurs de la nature mais qu’ensuite, c’était l’indifférence du reste du monde qui leur était jeté à la figure…il aurait voulu dire tant de choses pendant ces trente quatre secondes, tant de choses.
Puis la fenêtre se referma, le flot d’information reprit son court et c’est alors seulement, que Frédéric éclata en sanglot.

« - Il est sept heure passé de quelques secondes, les informations vous sont présentées par Lucile Daumier.
« - Bonjour. Drame ce matin dans la banlieue sud de Paris, un homme entre dans un café et tire sur le soit disant agresseur de sa fille…
Sans bouger, la voix lointaine et l’esprit encore embrumé de sommeil, Alex lança paresseusement à sa petite amie qui dormait juste à côté de lui :
« - Milie
« -…
« - Milie
« - Humm !
« - Eteint le réveil…
Une voix encore chaude de sommeil venue de dessous l’oreiller lui répondit, étouffée :
« -… J’écoute.
« - Menteuse. »
Il perçut alors le léger bruit d’une main glissant entre les draps chauds, sentit les doigts remonter en chuchotant le long de son corps, s’arrêter un instant sur son torse, le caresser doucement, presque sans le toucher, comme un petit souffle de chaleur. Elle se rapprocha alors, se pelotonna contre lui et d’une voix boudeuse lui dit :
« - J’ai pas envie de me lever. »
« Politique internationale, les Etats-unis maintiennent leurs positions en faveurs d’une intervention en Irak…
« - Non aller vas y. On a dit chacun son tour. Aujourd’hui c’est à toi de préparer le petit déjeuner. »
Elle se rapprocha de lui et lui souffla dans l’oreille :
« - Je vends ma matinée en échange de mon corps, tu n’es pas preneur ? lui glissa t elle d’un ton malicieux.
Tout en la serrant dans ses bras, il répondit :
« - Non. Alors tu sais ce qui te reste à faire…
Emilie fit semblant d’être fâchée et tout en enfilant le tee-shirt de Yann qui traînait par terre, se dirigea vers la cuisine. Elle alluma le second poste de radio, juste assez fort pour l’énerver. Puis elle baissa le son et mis l’eau à bouillir :
« Sport, le PSG écrase Marseille 3 buts à 0 infligeant au club phocéen sa plus lourde défaite de la saison… »
Du fond de son nid douillet, Yann écoutait avec délectation se mélanger ces bruits du matin. Le son effervescent de la bouilloire pour le thé, les bols qui s’entrechoquent, le cliquetis des cuillères. Et puis l’odeur des tartines avant le bruit de leur bond métallique indiquant qu’enfin, elles étaient à point.
« A la bourse de New-York les coût du pétrole s’emballent Stéphane Saulier.
Effectivement Christian, ici à New-York… »
« - C’est prêt ! »
La voix d’Emilie avait glissé dans son oreille sans qu’il ne s’y attende. Il lui arrivait souvent ainsi de se rendormir à moitié, écoutant les nouvelles comme si elles ne lui étaient adressées qu’à lui. Il avait alors l’impression de faire partie de la rédaction, d’être là avec les journalistes qui lui rapportaient les informations. Il avait aussi ses petites habitudes auditives. La voix d’untel lui était, sans qu’il ne sache vraiment pourquoi d’ailleurs, agréable et familière, alors que le débit de mitraillette d’un autre, l’insupportait.
Il jeta un œil mi-clos au réveil. Sept heures trente quatre ; impossible de se rendormir sans entamer par la suite une course endiablée contre les minutes pour ne pas arriver en retard au boulot. D’un pas mou il se leva, enfila un caleçon, passa un tee-shirt à l’envers et se dirigea vers la table.
« - Et tout de suite, le chronique géopolitique de Martin Béral :
Les relations entre l’Irak et les Etats-Unis…
« - Tu croies qu’il va y avoir la guerre toi, là bas ? » lui demanda Emilie.
« - Je ne sais pas trop. Il y a beaucoup d’argent en jeu alors euh…je pense que c’est plutôt probable. »
Puis il plongea le nez dans son thé, faisant danser les miettes avec sa cuillère dans le liquide ambré. Emilie lui posa encore une ou deux questions puis, face à la mauvaise volonté évidente qu’il mettait à répondre, préféra renoncer. Les minutes passaient et les chroniques s’enchaînaient les unes après les autres. Leur rythme régulier tous les matins avait un côté rassurant pour Yann. Il savait quasiment sans regarder l’heure si il était en avance ou non, si il avait besoin de se presser ou bien si il pouvait prendre encore un peu le temps de se laisser porter par ses pensées encore voilées de rêves. Aujourd’hui il avait un peu de temps. Emilie avait entamée son ballet matinal. Elle courrait d’un bout un l’autre de l’appartement, cherchant son jean posé sur la chaise de la chambre bien en évidence, se maquillant tout en se brossant les dents et ne cessant de répéter :
« - Ohlala, non mais là c’est sûr je vais être en retard… » Encore un ou deux passages, un bisou furtif avec la promesse de s’appeler pour midi, puis la porte claqua et Yann se retrouva seul avec la radio. La ronde des nouvelles avait repris, charriant en vrac politique internationale, science et sport. Mais ce matin là à la fin du journal, surgit une chronique du bout du monde au goût amer. Une nouvelle qui le retint trente quatre secondes de plus que d’habitude sur sa chaise. Une nouvelle portée par une voix à travers laquelle, du fond de sa petit vie à peine effleurée de temps à autre par ce que pouvait être le mot problème, Yann pu lire tour à tour, la déception, l’impuissance, l’horreur et la tristesse profonde et sincère d’un homme désemparé. Trente quatre secondes de désillusions. Ce jour là, le nom de Frédéric Filatreau resta gravé dans sa mémoire.

« - Oui Christian ici il n’y a plus rien et évoquer le mot catastrophe ne signifierait pas grand chose tellement la situation semble désespérée. Les être humains qui ont survécu au cataclysme errent pour la plus part comme des fantômes dans les rues à la recherche d’eau potable et de nourriture. Tout a disparut dans cette île. Le réseau d’eau déjà précaire a explosé en de nombreux endroit, l’électricité n’est plus qu’un souvenir. Les rues ont été envahies par des coulées de boues jusqu’à une hauteur de plus d’un mètre cinquante et comme le soleil a refait son apparition elle commence à durcir empêchant tout déblayage.
J’ai vu hier soir des corps encastrés dans les arbres comme si il s’agissait de simple morceau de linge. L’arrière pays quand a lui est totalement inatteignable. Personne ne sait ce qu’il en est de dizaines de villages qui se trouvaient sur la trajectoire des coulées de boues. L’aide internationale commence tout juste à arriver, mais déjà, les gens ici n’ont absolument plus rien…même plus l’espoir. En direct de Madagascar pour RadioNouvelles, Frédéric Filatreau»