mercredi 12 novembre 2008

Conte : La baie des cormorans (8)

« - C’est lui qui me trouvera…ah tien ! C’est nouveau ça. Bon. Il ne me reste plus qu’à attendre alors. » Le prince regarda tout autour de lui. Il n’avait donc plus rien à chercher. Il n’avait qu’à attendre et à être attentif.

Il se laissa alors doucement remonter vers la surface. La plaine s’étalait à perte de vue. Elle ondoyait parfois lorsque le courant jouait avec les algues. On pouvait y voir des collines et des vallées toutes en rondeurs ondulant calmement sous le tapis vert. Et toute une vie s’animait au dessus de cette masse épaisse et continue. Des poissons, seuls ou en banc se promenaient, chassaient, divaguaient, virevoltaient çà et là. Le prince se laissa aller à la contemplation de ce spectacle. Cela le changeait tellement de ce qu’il avait pu voir jusqu’alors. Et puis, était ce le fait qu’il n’avait pour ainsi dire, plus rien à faire qui avait ainsi modifié sa vision du monde. Toujours était il qu’il voyait maintenant autour de lui un monde totalement nouveau, entièrement à explorer. Il n’était plus un prince qui se rendait d’un endroit à un autre avec la nécessité de trouver ce qu’il cherchait. Il était un petit poisson au milieu d’une immensité toute entière à explorer. Et l’envie de découvrir était entrain de gonfler en lui.

Puis ses pensées allèrent vers la fille de la baie. Il la revoyait, nageant entre deux eaux, se dirigeant vers lui comme si elle-même avait été un être de la mer. Son cœur se mit à battre et tout autour de lui tout lui paru soudain bien triste.

Il était en train de dériver au lentement lorsque son regard fut attirer par une étrange tâche blanche posée en plein milieu des algues. Il commençait à faire nuit et comme celle-ci brillait légèrement, il était quasiment impossible de ne pas la remarquer. Il plongea vers le fond pour se fondre dans la masse d’algues. Puis discrètement, il tenta de s’approcher de la tâche lumineuse. C’est à ce moment là qu’une voix lui parla dans sa tête :

« - Inutile de te cacher. C’est toi que j’attendais. » Complètement surpris il répondit :  

« - Moi ? Vous êtes sûr ?! Comment pouvez vous savoir ?

« - Ne t’en fait pour ça. Avant que tu ne montes sur mon dos et que je te conduise dans le monde que tu désires tu dois savoir une chose. Nous ne nous ne sommes pas fait, toi comme moi pour évoluer dans le monde des airs et des vents. En montant sur mon dos, tu bénéficieras de mon aura magique pour quelques heures. Passé ce délais et une fois le soleil revenu, tu devras impérativement venir me rejoindre là où tu m’as laissé et nous devrons retourner sous l’eau quoi qu’il arrive. Si tu ne reviens pas avant ce moment là, je te laisserai seul et tu mourras. Mais rassure toi. Tant que je serai en dehors de l’eau tout ira bien pour toi. Alors ? On y va ? »

Sans hésiter une seule seconde, le prince enfourcha l’hippocampe blanc qui aussitôt fila comme le vent. Le vent. Se fut cette sensation étrange qui fit ouvrir les yeux au prince. Ils étaient en train de galoper le long de la plage qui bordait la baie des cormorans. La lune inondait la nuit de sa lumière douce. Tout en haut de la colline qui surplombait la baie, une petite lueur éclairait les fenêtres d’une maison.

« - Va, c’est la haut qu’elle habite. Mais surtout n’oublie pas. Reviens avant le jour sinon…. » Le prince entendit à peine la dernière recommandation. Il courut tout le long du petit sentier qui le conduisit jusqu’à la demeure. L’air emplissait ses poumons. Essoufflé et euphorique, il frappa d’une main tremblante à la porte. Quelques secondes plus tard, celle-ci s’ouvrait et pour la première fois, ils purent se parler.

La nuit s’envola, pleine de paroles et de charmes. Le prince crut vivre un rêve. Lorsqu’il ouvrit les yeux le matin, sa première réaction fut de sauter hors du lit. Le soleil courrait sur sa peau et….non ; il passa sa main sur tout son corps ; il n’était pas mort. Il regarda la pièce tout autour de lui. Sur la petite table de chevet, celle qui était située sous la fenêtre et qui donnait sur la mer, il vit posé là, un petit hippocampe blanc, sec, parfaitement conservé. Un sourire illumina son visage. Il descendit l’escalier jusqu’à la cuisine, l’hippocampe à la main. Elle le regarda l’air malicieux :

« - Je l’ai trouvé en allant me promener ce matin sur la plage. J’ai pensé que se serait un joli cadeau. Ils sont rares ceux qui sont tout blanc comme ça. »

Le prince n’eut jamais à retourner sous la mer et il put rester avec la fille de la baie des cormorans. Il ne chercha jamais à savoir comment et pourquoi il avait pu ainsi rester là. Mais le bonheur qui l’envahi à se moment là le porta chaque jour. Le bonheur d’avoir pu changer son destin et d’avoir été libre.

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