mercredi 25 juin 2008

Moment

La gifle

La claque lui gifla la figure pleine de haine et de violence. Une claque lourde de toute l’aigreur et la rancœur accumulée au cours de ces années d’erreurs. Car oui elle le savait désormais, elle en était sûre, tout ceci n’avait été qu’une vaste et profonde méprise. De sa part d’abord mais de la sienne aussi. On ne vit pas accroché à un rêve mais on meurt de s’accrocher à un souvenir. Et cette histoire était morte de n’avoir voulu exister qu’en se nourrissant de ce qui avait été, il y a longtemps, il y a cinq ans exactement. Le souvenir d’un coup de foudre intense, avait été le seul combustible de l’histoire qu’ils avaient voulu prolonger en s’imaginant que la force de ce moment suffirait à leur faire traverser la vie ensemble. Parce que c’est ce qui arrive aux couples qui se forment dans l’amour, normalement. Et le leur fut sincère, énormément. Mais un temps seulement et la sincérité de cet instant seul ne leur avait pas suffit. Maintenant l’état de leur éloignement, de leurs petites trahisons et de leurs grosses hypocrisies leurs éclataient à la figure avec toute la violence de la bombe qui couve et dont on ne se méfie plus, persuadé qu’elle n’exploserait jamais.
Ils avaient évolué mais pas dans le même sens. Il était d’abord devenu distant avant de devenir bêtement absent. Elle l’avait laissé faire, s’arrangeant d’autres manières. Ce n’est que lorsqu’elle commença à réaliser la distance qui les séparait qu’elle comprit à quel point elle ne l’aimait plus. Elle le voyait de loin rentrer tard le soir, partir après elle le matin, l’appeler de temps à autre pour lui dire qu’elle ne devait pas l’attendre, qu’il avait du travail…ou quelque chose de mieux à faire que de rentrer. Elle, jouait la femme faussement offusquée. Leur séparation était née de cet éloignement progressif, lent, passif. Pas d’une haine ou d’un ressentiment. Tout cela était venu plus tard, bien plus tard. A l’éloignement, avait succédé l’indifférence. Feinte d’abord, puis hostile ensuite. L’indifférence qui blesse. C’était à partir de ce moment là que tout avait changé, lorsqu’elle avait commencé à jouer de cette désinvolture qu’ils affichaient chacun de leur côté. Les petites provocations s’étaient muées en attentats ciblés et le jeu c’était transformé en règlement de compte.
Ce soir là, en l’attendant, elle savait quels mots elle devait prononcer sur quel ton, appuyé de quel regard, pour que leur couple explose enfin. Elle serait alors débarrassé de cette mascarade sclérosante et renverrait à son ingratitude cet homme qui pensait que posséder était le synonyme d’aimer. Lorsqu’il entra et que les hostilités débutèrent, effectivement, tout se passa comme prévu. Mise à part cette gifle.

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